Accessibilité numérique : quelles entreprises du secteur privé concernées ?

Publié le 16 janvier 2025

En France, l’accessibilité numérique concerne de plus en plus le secteur privé, notamment en raison de l’évolution des réglementations et des attentes sociales en matière d’inclusion. Bien que la loi pour une République Numérique (2016) cible principalement et logiquement les services publics, plusieurs acteurs du secteur privé doivent également se conformer à des exigences d’accessibilité, que ce soit en raison de leur lien avec le secteur public ou de l’extension des obligations légales. Le cadre légal se durcissant en 2025 (voir notre article sur le sujet), l’enjeu pour le secteur privé est tout à fait actuel.

Dans cet article, nous faisons le point sur les principaux groupes d’acteurs du secteur privé les plus concernés par l’accessibilité numérique en France.

1/ Les entreprises fournissant des services numériques aux entités publiques : l’accessibilité de fait.

Les entreprises privées qui travaillent avec des administrations publiques ou qui fournissent des services numériques à l'État ou aux collectivités locales sont obligées de respecter les normes d'accessibilité. On trouve par exemple :

  • Les prestataires de services web (agences digitales, sociétés de développement web, éditeurs de logiciels, etc.) qui conçoivent des sites, des applications mobiles, ou des outils numériques pour le compte des administrations publiques. Ces prestataires doivent veiller à ce que leurs produits numériques respectent les exigences d’accessibilité.
  • Les entreprises sous-traitantes de services publics : Les entreprises privées qui gèrent des sites web publics ou des plateformes interactives au nom des institutions publiques doivent garantir leur conformité avec les normes d'accessibilité numérique, celle-ci pouvant évoluées, se durcir.

 

2/ Les entreprises de l’e-commerce et l’accessibilité de la vente en ligne

Les sites e-commerce privés sont de plus en plus sous pression pour rendre leurs plateformes accessibles, en particulier dans les contextes suivants :

  • Obligations liées aux contrats publics : Si un site e-commerce privé travaille en partenariat avec des organismes publics (comme un marché public), il devra répondre aux exigences d’accessibilité numérique. Les fournisseurs de consommables, de matériels de bureau/bureautiques, les fournisseurs de mobiliers urbains, de signalisation urbaine, … sont notamment concernés et loin d’être exhaustifs.
  • Conformité légale : Les entreprises du e-commerce doivent se conformer aux normes d’accessibilité (notamment les WCAG : Web Content Accessibility Guidelines) pour offrir un service inclusif à tous les utilisateurs, qu’ils soient valides ou non.
  • Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) : En réponse aux attentes croissantes des consommateurs, de plus en plus d’entreprise du secteur e-commerce intègrent l’accessibilité numérique dans leur politique RSE, notamment pour améliorer l'expérience des personnes en situation de handicap.
47 %
Des sites e-commerce respectent les règles d'accessibilité

D’après le baromètre de l’accessibilité numérique (https://accessibilitenumerique.com/) qui référence et audite 48 sites dans la catégorie e-commerce, la note moyenne d’accessibilité est de 47/100. Aucun site ne respecte les critères RGAA (Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité) au-delà de 78/100.

Le podium est occupé par Veepee avec 78%, suivi de SNCF Connect avec 76% et une refonte qui avait suscité quelques controverses à sa mise en ligne. L’acceptation est depuis passée par là avec une note d’accessibilité plutôt bonne, preuve en est qu’il faut parfois prendre de la hauteur quand des changements profonds d’UX et UI sont opérés. Le 3ème acteur de l’e-commerce est Mes solutions Family (plateforme de services et conseils de parentalité pour les salariés) avec une note de 67%.

On tombe ensuite à 54% dès la 4ème place avec Leroy Merlin. Les acteurs du e-commerce, ont donc des efforts à faire pour améliorer l’accessibilité et permettre à tous de profiter du canal e-commerce devenu un incontournable du parcours d’achat.

Qu'en est-il des acteurs du B2B ?

Les acteurs du B2B semblent moins concernés par les obligations de l'EAA (European Accessibilité Act) du 28 juin 2025 autre terminologie de la  Directive Européenne sur l'accessibilité numérique (directive UE 2019/882) :

" Il existe toutefois une certaine nuance en ce qui concerne son application aux entreprises B2B : Si un site vend exclusivement des produits et des services à des entreprises B2B, les EAA ne s'appliquent pas, mais si le site sert à la fois des entreprises B2B et B2C, les EAA s'appliquent. Si, par exemple, vous avez un site de commerce électronique comme Amazon Business qui ne vend qu'à des entreprises B2B, il n'est techniquement pas tenu de respecter les EAA."

Source : https://www.siteimprove.com/

 

Mais les avis divergent sur la question avec l'interprétation des textes réglementaires et des zones de recouvrement parfois ténues entre activité B2B, B2B2C,... On évoque aussi un seuil de chiffre d'affaire qui, si il est dépassé, impose aux entreprises (B2B intégrées) le respect de la réglementation en matière d'accessibilité. A titre d'information voici 2 des sites référents sur la question de l'accessibilité à consulter :
- Le portail web officiel de l'Union Européenne

- Le site publique et officiel dédié à l'accessibilité en France : https://accessibilite.numerique.gouv.fr/

Pourquoi les acteurs B2B doivent-ils se mobiliser ?

Même si le B2B n'est pas toujours en première ligne pour les obligations d'accessibilité (par rapport aux services destinés aux consommateurs finaux), les transactions et interactions entre entreprises incluent des professionnels en situation de handicap. De plus, une mise en conformité peut améliorer l'expérience utilisateur globale et renforcer l'image de marque.

Une recommandation de prudence donc : pour les entreprises e-commerce B2B il est essentiel d'anticiper ces obligations en entamant dès maintenant des démarches pour auditer et adapter leurs interfaces numériques. Cela permettra de respecter les échéances réglementaires tout en évitant des sanctions.

3/ L’accessibilité pour les entreprises de services bancaires et financiers

Les entreprises du secteur financier, comme les banques, les assurances et les fintechs, sont elles aussi particulièrement concernées par l'accessibilité numérique, car elles proposent des services sensibles (transactions financières, gestion de comptes, etc.) qui doivent être accessibles à tous :

  • Services en ligne : Les services bancaires en ligne et les applications mobiles doivent être accessibles aux personnes en situation de handicap visuel, auditif ou moteur.
  • Conformité avec les obligations légales : Les institutions financières, en particulier celles qui travaillent avec le secteur public ou les grandes entreprises, sont soumises à des exigences strictes en matière d’accessibilité.

 

Là encore on touche à un secteur stratégique en terme d’accessibilité. Si on a vu avec l’e-commerce que le chemin restant à parcourir est encore long, le secteur bancaire lui obtient globalement de meilleurs résultats avec une note moyenne de 55/100 sur les 15 sites référencés et audités.

Mais la note maximale n’est que 76% obtenu par la Banque de Savoie qui ne fait pourtant pas partie des majors bancaires, suivi du CIC à 65% et de Hello Bank à 63%.

En fait la plupart des banques référencées, se positionnent entre 50 et 65% ce qui globalement permet au secteur d’afficher cette moyenne de 55% de respect des normes RGAA.

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74/100
Note moyenne des acteurs du secteur public en matière d'accessibilité, relativement loin du 100%...

A titre de comparaison avec le secteur public, sur 47 mairies référencées et auditées, la note moyenne est de 74/100 avec quelques collectivités atteignant les 100% comme Pont L’Evêque ou encore Vannes. Même avec cette moyenne très supérieure au privé, on attend cependant un score quasi parfait de l’ensemble des collectivités pour être en phase avec la mission de service publique qu’elles portent.

4/ Accessibilité : un enjeu de santé public porté par les entreprises du secteur de la santé

Le secteur de la santé, y compris les hôpitaux, cliniques privées, assurances santé, et applications de santé numériques, doit garantir l’accessibilité des sites internet et des applications mobiles afin de permettre aux personnes handicapées d'accéder aux informations médicales et aux services :

  • Accès aux informations de santé : Les informations sur les soins, la prise de rendez-vous en ligne, ou l’accès à des données médicales doivent être accessibles à tous les citoyens.
  • Conformité aux règles d’accessibilité : Les acteurs de la santé en ligne doivent s’assurer que leurs interfaces (portails, applications) sont utilisables par tous les patients, indépendamment de leurs capacités.

Le secteur de l’assurance fait un petit peu mieux en matière d’accessibilité que la banque avec une note moyenne de 57/100 sur 34 sites référencés et audités.

Ici encore la situation est particulière avec un écart type important. Des sites obtiennent d’excellents résultats notamment Aesio avec 95% et Société Générale Assurance avec 90% suivi de CNP assurances avec 87% de respect des règles d’accessibilité. Dans le même temps des gros acteurs de l’assurance affichent des notes inférieures à 30% démontrant la disparité de l’intégration de l’accessibilité dans les dispositifs digitaux des acteurs de l’assurance.

 

5/ Les entreprises de l’électronique et des technologies : l’accessibilité logique

Les entreprises qui développent des technologies numériques (applications mobiles, logiciels, objets connectés, plateformes de services numériques) sont également très concernées par l’accessibilité. On pense ici, sans être exhaustif, aux entreprises positionnées sur le marché de la domotique ou encore du smart (smartcity, smartgrid…).

Les attentes en matière d’accessibilité portent notamment sur :

  • Les applications mobiles et plateformes web : Les services numériques proposés sur les plateformes web, ainsi que les applications mobiles, doivent être accessibles à un large public, y compris les personnes handicapées.
  • Les obligations légales et sociétales : Certaines entreprises qui développent des technologies en B2B (Business to Business) ou en B2C doivent garantir la conformité à des normes d’accessibilité, que ce soit par des impératifs légaux ou pour des raisons de bonne gestion de leur image de marque.

 

6/ Les entreprises de l’éducation et de la formation en ligne : l’accessibilité pour l’égalité des chances.

Les institutions d'enseignement, les universités, les organismes de formation en ligne (MOOCs) et les plateformes de e-learning sont tenus de respecter les normes d’accessibilité numérique pour permettre à tous les étudiants, quel que soit leur handicap, d’accéder à l’enseignement :

  • Accessibilité des plateformes pédagogiques : Les plateformes d’enseignement en ligne doivent être adaptées aux personnes en situation de handicap, en intégrant des fonctionnalités telles que la lecture vocale, des sous-titres, ou des interfaces de navigation accessibles.
  • Normes d’accessibilité pour les contenus pédagogiques : Les cours en ligne, vidéos et documents doivent respecter des critères de lisibilité, comme l’utilisation de polices adaptées, l’option de sous-titrage et d’autres fonctionnalités d’aide à l’accès à l'information.

 

7/ Les entreprises du secteur de la culture et des loisirs : l’accessibilité et le droit au divertissement pour tous.

Les entreprises dans le secteur culturel, comme les musées, cinémas, salles de concert et parcs d’attractions, sont également responsables de rendre leurs sites web et applications accessibles à tous les publics, notamment pour :

  • La réservation et billetterie en ligne : Les sites de billetterie et de réservation doivent offrir une accessibilité complète pour que toutes les personnes, y compris celles avec des handicaps moteurs, auditifs ou visuels, puissent acheter des billets et participer à des événements.
  • Les sites institutionnels : Les sites web des institutions culturelles doivent également être accessibles en offrant par exemple des descriptions audio pour les expositions ou des sous-titres pour les vidéos.

 

8/ Les entreprises de la grande distribution et des supermarchés en ligne : l’accessibilité au quotidien

Les sites web de grande distribution et les supermarchés en ligne doivent rendre leurs interfaces accessibles pour permettre à tous les consommateurs, y compris ceux avec des handicaps, d'effectuer des achats et d’interagir avec les services de manière fluide :

  • Accessibilité des sites e-commerce : Les sites de supermarchés en ligne doivent garantir l’accessibilité pour permettre une navigation simple et une expérience d’achat fluide pour toutes les personnes, indépendamment de leurs capacités.

 

9/ L’accessibilité et les entreprises de communication et de publicité : pouvoir être ciblé comme tout autre consommateur 🙂

Les agences de communication et de publicité, qui créent des campagnes numériques, sont responsables de l’accessibilité des contenus qu’elles produisent. Cela inclut :

  • Publicité numérique et bannières : Les contenus publicitaires diffusés sur le web, y compris les bannières, vidéos et autres supports, doivent être accessibles (ex. : textes alternatifs, sous-titres, etc.).

 

L’accessibilité, un enjeu majeur d’équité pour le quotidien de 12 millions de personnes en France.

Les secteurs du numérique, du e-commerce, de la bancassurance, de la santé, de l'éducation, et de la grande distribution, ainsi que les entreprises liées aux services publics sont les acteurs du secteur privé les plus concernés par l’accessibilité numérique en France.

Ces acteurs doivent se conformer aux normes d’accessibilité pour répondre à des exigences légales, améliorer leur image et offrir des services inclusifs. Les entreprises qui collaborent avec des institutions publiques sont particulièrement soumises à des obligations strictes en matière d’accessibilité, mais une tendance générale vers une meilleure inclusion pousse l’ensemble du secteur privé à adopter des pratiques plus inclusives pour faciliter le quotidien des 12 millions de personnes en situation de handicap.

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